Quand le Pop Art et le Street Art glissent sur les planches de skateboard
- Delphine & Romain CLASS
- il y a 2 jours
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 11 heures
Inventé dans les années 1950 en Californie comme une alternative au surf les jours sans vagues, le skateboard est rapidement devenu bien plus qu’un simple sport de glisse. Symbole de liberté, d’audace et d’identité urbaine, il a toujours flirté avec les cultures alternatives : punk, hip-hop, graffiti… Dès les années 1980, la planche de skate s’impose comme une véritable icône de la contre-culture. Mais au fil du temps, elle a quitté les seuls skateparks pour entrer dans les galeries d’art et les collections privées.
La raison ? Son design. Le « deck », cette planche en bois pressé, est une surface plane, allongée, au potentiel graphique immense. Comme une toile miniature et mobile, la planche de skate attire les artistes contemporains qui y trouvent un support original, hybride, entre objet utilitaire et œuvre à contempler. Ce mouvement a pris de l’ampleur avec la montée en puissance du street art et du pop art, deux courants qui partagent avec la culture skate un goût pour la rue, l’énergie et la démocratisation de l’art.
Aujourd’hui, de Shepard Fairey (Obey) à Banksy, en passant par Keith Haring, ou plus récemment Hom Nguyen, de nombreux artiste ont investi ce support, donnant naissance à une forme artistique à part entière : le skateboard d’art.
Obey : l’activisme graphique en mouvement
Shepard Fairey, connu mondialement sous le nom d’Obey, est sans doute l’un des artistes contemporains qui symbolisent le mieux la rencontre entre art et contestation. Depuis son fameux autocollant « André the Giant Has a Posse » à la fin des années 1980, jusqu’à son affiche « HOPE » pour Barack Obama en 2008, il a construit un langage visuel puissant, fondé sur des contrastes forts, une palette réduite (rouge, noir, beige) et un graphisme inspiré de la propagande.
Sur les planches de skateboard, Obey transpose ce style unique. Ses decks deviennent des manifestes roulants : slogans incisifs, icônes politiques, critiques sociales. L’esprit contestataire de la culture skate entre en parfaite résonance avec son univers militant. Ces planches, produites parfois en séries limitées, circulent entre skateparks, galeries et ventes aux enchères. Elles matérialisent la rencontre entre deux mondes rebelles, et rappellent que l’art n’a pas besoin de murs blancs pour exister.
Hom Nguyen : le portrait humain au cœur de l’urbain
Artiste français autodidacte, Hom Nguyen s’est imposé par ses portraits filaires aux traits libres et intenses. Ses œuvres, réalisées au fusain, au feutre acrylique ou à l’huile, révèlent une humanité brute, pleine d’émotion. Transposées sur des planches de skateboard, elles prennent une dimension nouvelle, d'autant plus que l'artiste passait beaucoup de temps sur son skateboard, dans sa jeunesse.
Les visages dessinés par Nguyen semblent à l’étroit sur la surface allongée du deck, débordant de toute part, comme si l’émotion refusait de se contenir. Ce contraste entre la puissance expressive du trait et le support populaire qu’est le skateboard crée une tension captivante. En utilisant ce médium, la planche de skate, Hom Nguyen rend ses portraits plus accessibles, et les relie à une jeunesse urbaine, cosmopolite, habituée à naviguer entre culture de rue et art contemporain.
Ses planches de skateboard ne sont pas seulement décoratives : elles témoignent de sa volonté de faire dialoguer l’intime et le collectif, l’art noble et la culture populaire.
Banksy : l’art subversif qui roule partout
Difficile de parler de street art sans évoquer Banksy. Le mystérieux artiste britannique, dont l’anonymat nourrit la légende, a toujours cherché à sortir l’art des cadres traditionnels. Son univers, mêlant humour noir, critique sociale et poésie, trouve sur le skateboard un terrain de jeu idéal.
Les rats provocateurs, les enfants rêveurs, les policiers caricaturés : autant d’icônes qui se retrouvent sérigraphiées sur des decks en éditions limitées. Le skateboard, par essence mobile, prolonge le message de Banksy : l’art doit circuler, se propager, se faufiler partout, y compris dans la rue, sur un objet du quotidien.
Ces planches de skate, recherchées par les collectionneurs, atteignent aujourd’hui des prix impressionnants. Mais elles conservent leur dimension initiale : celle d’un art démocratique, critique et accessible, toujours prêt à bousculer les normes.
Keith Haring : l’énergie d’une jeunesse en mouvement
Dans les années 1980, Keith Haring est l’un des premiers artistes à faire dialoguer l’art et la culture populaire avec une telle intensité. Ses fresques colorées, ses silhouettes dynamiques et ses motifs répétitifs sont pensés pour être compris immédiatement, sans explication.
Lorsqu’ils sont déclinés sur des skateboards, ses dessins semblent trouver un terrain naturel. Les silhouettes dansantes, les bébés rayonnants et les chiens aboyeurs s’adaptent parfaitement aux lignes de la planche. Tout comme la pratique du skate, son art est synonyme de mouvement, de rythme, d’énergie.
Mais au-delà du style, Haring a aussi utilisé son œuvre comme un moyen de sensibiliser le public aux enjeux sociaux de son temps : lutte contre le sida, défense des droits humains, engagement politique. Ses planches de skateboard reflètent cette double dimension : un art joyeux, coloré et universel, mais porteur d’un message engagé.
D'autres modèles de skateboard seront bientôt proposés à la vente, tels que Pulp Fiction, Turf War, Lough Now, ou encore Love Rat de l'artiste contemporain Banksy.
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