Henri Iglésis souffle la vie dans ses sculptures de Petits Bonhommes
- Delphine & Romain CLASS
- 17 juil.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 18 juil.
À mi-chemin entre artisanat d’atelier et art contemporain, Henri Iglésis façonne un monde à part. Né d’un savoir-faire métallurgique familial et d’un geste inventif unique, l’artiste catalan a su créer une signature aussi audacieuse qu’enjouée : celle de la tôle soufflée. Et au cœur de cet univers gonflé d’humanité se tient son personnage fétiche, le “Petit Bonhomme”, joyeuse sentinelle de métal et d’air.

Une invention née d’un souffle et d’un accident
L’histoire commence dans les ateliers métallurgiques de Perpignan, là où Henri Iglésis, né en 1964, baigne dès l’enfance dans le bruit des marteaux et l’odeur du fer chaud. Petit-fils de forgeron et fils de tourneur-outilleur, il suit naturellement une formation de chaudronnier-soudeur. Pourtant, derrière cette rigueur technique, sommeille une imagination débordante.
C’est en 2008 que la magie opère. Alors qu’il tente de créer un buste pour faire un cadeau à son fils, Henri Iglésis a une idée improbable : souder deux coques de tôle entre elles, puis y insuffler de l’air comprimé. Sous l’effet de la pression, la tôle gonfle, prend forme… et devient une sculpture pop art, une fois peinte. L’accident artistique – parfois littéral, comme ce cyprès de métal de 1,50 m qui explose et lui fracture le poignet – se transforme en invention : la tôle soufflée est née. Il va progressivement en faire son activité principale et devenir artiste à temps plein.
Aujourd’hui, cette technique de tôle soufflée, protégée par un brevet, constitue le socle de toute son œuvre. L’artiste y voit un paradoxe fertile : marier la dureté et la rigidité du métal à la douceur presque infantile et poétique de la courbe de ses œuvres d’art, la rigidité à la légèreté, l’industriel à l’organique.
Le “Petit Bonhomme” : un personnage universel
Au fil des expérimentations naît une forme de sculpture récurrente : celle d’un petit personnage stylisé, aux bras tendus, au corps rondouillard, parfois souriant, toujours ludique et souvent coloré. Baptisé “Petit Bonhomme”, il devient la mascotte de l’artiste, son œuvre pop art emblématique, son alter ego en métal soufflé. Ce personnage incarne à lui seul toute l’intention de l'artiste Henri Iglésis : créer une œuvre pop art accessible, joyeuse, immédiatement lisible par le plus grand nombre.

Inspiré de la silhouette enfantine du “bonhomme allumette”, ce personnage fait appel à l’inconscient collectif. Il évoque à la fois les jeux de notre enfance, les pictogrammes naïfs, les formes universelles. Loin de l’art élitiste, le “Petit Bonhomme” vient au contraire désacraliser la sculpture contemporaine en l’habillant de tendresse et d’humour. C’est un shoot de bonheur et de positivisme au quotidien.
Une technique entre rigueur et fantaisie
Chaque sculpture est le fruit d’un processus exigeant. Les tôles sont découpées, soudées minutieusement à la main, puis gonflées avec de l’air à haute pression. Ce souffle n’est pas anodin : il donne vie à la matière, mais impose des contraintes physiques fortes. L’air se heurte aux soudures, cherche à s’échapper, provoque des formes inattendues, que l’artiste apprend à maîtriser sans jamais totalement les dominer. Chaque œuvre ainsi créée est unique, il n’en existera pas d’autre identique, puisque les déformations lors du gonflage haute pression sont aléatoires et différentes sur chaque création.
Henri Iglésis revendique ce caractère semi-aléatoire : «Ce n’est pas moi qui décide de tout, c’est le métal qui me répond. Chaque sculpture a sa propre personnalité, son propre souffle.» Le travail se termine par la mise en couleur : peinture laquée, vernis mat, patines satinées. Les œuvres se déclinent dans une palette audacieuse : rouge flamboyant, bleu Klein, rose bonbon, orange vif, noir profond.

Une œuvre empreinte de joie et de poésie
Ce qui frappe d’abord, face aux “Petits Bonhommes”, c’est leur capacité à faire sourire à procurer du bonheur et de la sérénité à celui ou celle qui le contemple. Loin de l’austérité souvent associée à la sculpture métallique, les créations du sculpteur pop Henri Iglésis rayonnent de joie et d’humour. Elles sont dans l’esprit Pop Art. Elles semblent tout droit sorties d’un rêve d’enfant, prêtes à s’envoler comme des ballons, à danser dans un carnaval invisible. Elles sont proposées en deux tailles standard, 45 ou 70 cm de haut, mais peuvent aussi être réalisées sur commande en plus d’un mètre. Disponibles sur un socle, ou sur une tige (qui donne au petit bonhomme une impression de voler), elles peuvent également être combinées par deux ou trois petits bonhommes. L’artiste a même réalisé une sculpture avec une farandole de petits bonhommes colorés en cercle.
Mais derrière cette légèreté, se cache aussi un message plus profond. Ces formes simples, universelles, questionnent notre rapport au corps, à l’identité, à la mémoire. Le “Petit Bonhomme” devient symbole de résilience, de simplicité retrouvée, de retour à l’essentiel.
Certaines œuvres mesurent à peine vingt centimètres, d’autres plus d’un mètre soixante-dix. Elles peuvent trôner dans un salon, sur un bureau, ou en plein air, dans un jardin public ou l’entrée d’une entreprise. Chacune garde la même capacité à toucher le spectateur, quel que soit son âge ou sa culture.
Une reconnaissance croissante
Depuis quelques années, le travail d’Henri Iglésis connaît un véritable engouement. Présenté dans plusieurs galeries françaises – dont Class Art Biarritz – il séduit collectionneurs privés et institutions. Ses œuvres intègrent des espaces publics, des halls d’entreprises, des expositions internationales.
L’artiste, lui, continue de créer depuis son atelier du Sud de la France, fidèle à sa matière première : la tôle. Il y poursuit ses recherches formelles, explorant d’autres volumes, d’autres personnages, d’autres émotions – mais toujours avec cette même philosophie : « Rendre le métal joyeux. »

En conclusion : le souffle d’un artiste
Henri Iglésis ne sculpte pas seulement la tôle. Il sculpte l’air, le jeu, l’instant. Par sa technique de la tôle soufflée, il insuffle à la matière brute une humanité désarmante. Ses “Petits Bonhommes”, à la fois drôles et poétiques, nous tendent les bras comme pour nous rappeler que l’art peut être simple, immédiat, et surtout profondément vivant.
Sa succession est déjà assurée puisque son fils Kevin se lance à son tour dans la sculpture en tôle soufflée.
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